Guide des métiers pour les petites filles, qui ne veulent pas finir princesses – Catherine Dufour
Guide des métiers pour les petites filles, qui ne veulent pas finir princesses – Catherine Dufour, Fayard 2014
Note d’Aline Aubertin
Dans l’introduction de ce guide Catherine Dufour, nous explique que peu avant les fêtes de Noël, elle a fait l’expérience que nous avons tous et toutes faite, en feuilletant les catalogues de jouets. Sur fond bleu pour les garçons, on trouve des autos, des motos, des bateaux et des boites de petit chimistes, à noter qu’il s’agit de jouets qui mettent les garçons en mouvement et les invitent à investir le monde. Pour les filles sont proposés sur fond rose des dinettes, des nécessaires à maquillage et des poupées, dont Barbie qui fait le ménage, avec un chariot super équipé : balai, seau, balayette, lessive, pelle, etc … Catherine Dufour se dit alors qu’il y a d’autres façons pour les filles d’être valorisées et de gagner sa vie, que de materner, de faire le ménage et de se pouponner pour être sexy.
A l’heure où l’enjeu de la mixité des métiers est prise à bras le corps par le Ministère des Droits des Femmes et alors que c’est un des enjeux traité de longue date par notre association, Catherine Dufour nous propose un catalogue d’une cinquantaine de « métiers » alternatifs, qui sont peu investis par les filles, à ce jour.
Chaque fiche-métier propose au moins deux portraits :
– l’un pris dans le passé, appartenant à l’histoire, qui a le mérite de nous montrer que les femmes n’ont pas attendu le XX et le XXIème siècle, pour s’intéresser aux métiers « d’hommes », même si la difficulté était encore plus grande : ainsi Julie d’Aubigny, aventurière épéiste au XVIIème siècle, ou Mademoiselle d’Angeville, alpiniste et Elisabeth Vigné-Lebrun, peintre, au XVIIIème
– une femme d’aujourdhui pour l’autre, concret, bien documenté : on sent clairement que Catherine a mené un entretien poussé.
Ce guide fait la part belle aux métiers scientifiques, sans doute parce que Catherine Dufour est ingénieure en informatique de formation, mais aussi parce que que nos métiers scientifiques sont trop peu féminisés :
– Cosmonautes, comme Valentina Terrechkova, russe qui part seule dans l’espace dans sa capsule en 1963 et Claudie Haigneré, qu’on ne présente plus
– Informaticienne, comme Augusta Ada, qui écrit le premier programme informatique au XIXème ou Marissa Mayer, PDG de Yahoo
– Ingénieure, comme Anne Chopinet, première femme à rentrer à Polytechnique et major de l’X en 1974, et Paloma Sanchis de Lanuza, experte des applications clients de systèmes hydrauliques
– Inventeuses, dont la liste est trop longue pour être reprise dans cette note, bien que non-exhaustive dans le guide !
– Mathématicienne, comme la célèbre Emilie du Chatelet, amie de Voltaire, qui traduit les travaux de Newton, en y ajoutant des notes qui complètent ses théories ou Michèle Audin, chercheuse en mathématiques et aussi écrivaine
– Microbiologiste ou plutôt biologiste, telle Rosalind Franklin, qui aurait du être nobellisée pour la découverte de la structure de l’ADN à Nicole Le Douarin, d’abord chercheuse au CNR, puis académicienne des sciences
– Paléonthologue, comme Marry Anning au XIXème et Valérie Masson-Delmotte, qui travaille au CEA
– Physicienne, comme Vera Rubin, astrophysicienne, qui travaille sur les trous noirs et Sophie Baton, mère de 3 enfants, qui travaille sur les LASERs.
– Sans oublier un chapitre sur les prix Nobel
Chaque fiche s’accompagne d’éléments pratiques précis et sans concessions, sur les études, l’insertion professionnelle et le salaire.
Au-delà de vrais métiers, le guide traite aussi de ce qui serait plutôt des hobbies, ou des modes de vie : aventurière, casse-cou, hackeuse, pilier de bar ou surfeuse. On y trouve dans le même ordre d’idée des femmes peu fréquentables mafieuses ou tortionnaires. La lecture de ces profils choquent tout d’abord, d’autant qu’ils n’ont pas pour objectif de susciter des vocations. Mais à bien y réfléchir, ce guide va jusqu’au bout de l’exercice de remise en question des stéréotypes. Les femmes ne sont finalement pas différentes des hommes, et peuvent se montrer aussi cruelles et/ou névrosées. C’est aussi un moyen d’apporter un peu de » légèreté » et d’ « humour » à cette lecture très sérieuse.
Nous vous le recommandons, achetez-le en particulier aux collégiennes et lycéennes, qui cherchent leur voix.