« Leviers-vous » : ensemble transformons nos carrières !
Le titre de ce second atelier joue à la fois sur l’identification des leviers qui aident les femmes dans leur carrière et sur la mobilisation, l’encouragement à prendre en main leur parcours professionnel, ce que, trop souvent encore, elles n’osent pas faire.
Des objectifs quantitatifs
L’oxygène, comme les femmes, est rare en altitude. Plus de cinquante ans après les premières lois sur l’égalité femme/homme au travail, le Cercle InterElles a souhaité, dans cet atelier, identifier les leviers qui contribuent à favoriser la carrière des femmes. Et comme pour l’atelier précédent, c’est un petit sondage mené auprès des congressistes qui a servi de base pour les développer.
À la première question : « Considérez- vous que vous avez un sponsor dans votre entreprise ? », la salle a répondu non à 62 %. La seconde : « Travaillez-vous votre visibilité professionnelle ? » a recueilli 55 % de réponses positives. En écho, les bonnes pratiques des entreprises, celles qui ont réellement apporté des résultats en termes de mixité, ont d’abord été présentées. Parmi elles figurent en premier lieu les objectifs quantitatifs, ou quotas, voulus et communiqués par les dirigeants ou le législateur, comme la loi Copé-Zimmermann ou la récente proposition des femmes dirigeantes dans la fonction publique.
« S’agissant de la loi Copé-Zimmermann, nous pouvons constater que bon nombre de groupes cotés sont en avance sur la réalisation de l’objectif de pourcentage de femmes dans les conseils d’administration, a souligné Marie-Hélène Mansard. La principale vertu de ce dispositif est de montrer que c’est possible de trouver des femmes éligibles à des mandats d’administratrices. Quand on les cherche, on les trouve ! » Certains dirigeants affichent aussi des objectifs de pourcentage de femmes dans les CODIR et COMEX. Ces objectifs sont connus et suivis, et même atteints, « à condition d’alimenter notre vivier », d’exemplarité dans l’entreprise, d’autres programmes existent comme le mentoring, le coaching, le tutorat, le codéveloppement ou encore a précisé Isabelle Eches (FACE : Fondation Aide Contre l’Exclusion). Il n’en reste pas moins que l’engagement, l’impulsion et le suivi attentif du dirigeant sont les principaux moteurs de la progression des carrières au féminin.
La performance des équipes mixtes
À côté des réseaux de femmes, qui permettent eux aussi de mettre en lumière des parcours et des valeurs qui ont un effet la sensibilisation à la mixité. Mais l’atelier a mis en avant un autre levier très important : la motivation des hommes, « puisque l’accès des femmes aux postes de direction ne se fait pas sans leur support actif », a fort opportunément souligné Christine Cluzel. Les principaux intéressés, interrogés, ont fait valoir plusieurs arguments : la performance des équipes mixtes, la variété dans la recherche de solutions et la volonté de refléter, en entreprise, la part des femmes dans la société. Et pour ceux qui sont pères, la volonté de maintenir l’égalité des chances pour leurs filles. « Partageons le pouvoir ! » ont-ils fait valoir. « Nous n’avons qu’un ennemi : la pensée unique, a ajouté Axel Haentjens (Orange). Mettons un terme au “clonage”. La mixité, tout comme la diversité des cultures et des âges, est plus que jamais nécessaire, tout simplement parce qu’elle est source d’enrichissement mutuel ». Un dernier levier enfin, qui n’est pas le moindre, est l’implication du dirigeant. Son engagement, son impulsion, son suivi attentif constituent en effet les principaux moteurs de la progression des carrières au féminin. « On peut même dire que sans une attitude engagée et volontariste de sa part, peu de choses évolueront au sein de l’entreprise », a commenté Christine Cluzel. Pour finir, l’atelier s’est intéressé au marketing de soi et à l’image des femmes au travail, « afin de donner aux femmes quelques conseils concrets pour les aider à incarner leur fonction, sans pour autant se déguiser, a résumé Marie-Hélène Mansard. Un vrai défi ! ».
Atteindre les objectifs de pourcentage de femmes dans les CODIR et COMEX permet de répondre à une objection fréquente concernant le vivier de femmes éligibles à des postes de dirigeants. On arrive à trouver des candidates, c’est possible ! » Isabelle Eches (FACE)
Quotas : le dispositif législatif
Adoptée en octobre 2010, la proposition de loi initiée par la députée Marie-Jo Zimmermann et soutenue par Jean-François Copé, alors président du groupe UMP de l’Assemblée nationale, porte sur la représentation équilibrée des femmes et des hommes au sein des conseils d’administration et de surveillance, et sur l’égalité professionnelle.
Concrètement, les entreprises ont trois ans à compter de la promulgation de la loi pour nommer 20 % de femmes dans leur conseil d’administration et de surveillance, six ans pour en nommer 40 %. Au final, cette obligation de mixité devrait concerner quelques 2 000 entreprises : 700 sociétés cotées et 300 entreprises de plus de 500 salariés réalisant un chiffre d’affaires (ou un bilan) de 50 millions d’euros par an.
Trop souvent, les femmes croient qu’elles seront reconnues à coup sûr pour leurs compétences, alors qu’elles doivent aussi travailler sur leur image et leur visibilité.
Cette démarche s’amorce par la connaissance de soi, de ses forces (ce qui est facile) et de ses faiblesses (ce qui l’est moins). « L’offre ou la marque, avec ses caractéristiques, sa performance, ses différenciateurs, c’est moi, avec mes compétences, mon expérience, mes savoir-faire, mes forces et mes faiblesses, a résumé l’oratrice. Mon image, c’est la perception que les autres ont de moi. Méfiez-vous de la première impression, c’est la bonne, disait Sacha Guitry. Or, on n’a jamais une deuxième chance de faire une première bonne impression… Il faut le répéter : les femmes doivent être lisibles – c’est-à-dire donner une image cohérente avec leurs objectifs et ce qu’elles sont elles-mêmes – et visibles. »
L’exposition, un impact majeur
Ce qui nous conduit au dernier point du marketing-mix : le réseau de distribution. « C’est ma présence dans les réseaux de femmes, les réseaux sociaux et professionnels, a encore précisé Marie-Hélène Mansard. Ce sont aussi mes sponsors, ceux qui parleront en bien de moi et me serviront de référence. Et on retrouve ici les hommes. Dans la réussite des carrières des femmes, on trouve souvent un homme qui a su donner le coup de pouce ou citer le nom qu’il fallait au bon moment. » « Pour apprendre à se vendre, il faut travailler sur soi, a poursuivi Aline Aubertin (GE Healthcare). Ce travail sur soi se décline autour de trois éléments : la performance, qui est le socle minimal nécessaire à la construction de sa crédibilité, l’image (le message que l’on envoie aux autres) et la visibilité. » « Votre exposition a un impact majeur sur votre carrière en vous mettant dans la lumière », a-t-elle repris, avant de dévoiler une étude particulièrement parlante : « Les mots représentent 7 % de ce qui va être retenu ; l’intonation et le ton de la voix, 38 %, et c’est déjà plus difficile à travailler ; quant au langage corporel, il représente 55 % des images que l’on véhicule. Conclusion : on est peu visible pour soi et tellement visible pour les autres ! »
Passage en revue de quelques-uns des différents leviers qui marchent. Beaucoup de nos entreprises ont mis en place des dispositifs de mentorat ou de formation à la diversité. Mais il reste encore beaucoup à faire pour traduire les bonnes intentions dans les faits.
Il se pratique dans presque toutes les entreprises du Cercle InterElles, mais il est nécessaire de mettre en place d’autres leviers plus performants comme le coaching individuel ou de groupe. » Le codéveloppement pratiqué d’abord chez EDF puis chez Thales est une forme de coaching individuel dans « un groupe homogène, de confiance et bienveillant ». Autre levier efficace : le sponsoring, pourtant peu répandu, comme l’a démontré le résultat du petit sondage en ouverture de ce deuxième atelier. « Il dépend de notre capacité à nous “faire vendre”, à nous rendre visibles sur le marché interne, a poursuivi Patricia Judes-Papon. C’est encore plus vrai à partir de 50 ans, quand on nous parle de “gestion de fin de carrière”… Mais on a encore 15 ans à travailler ! Alors trouver un sponsor devrait être une démarche prioritaire ! Car il est essentiel pour notre évolution de carrière qu’un “manager-ambassadeur” puisse dire que l’on est motivée, compétente et efficace. »
Enfin, les programmes de sensibilisation à la mixité se développent eux aussi de plus en plus. Ils ont un rôle à jouer, en particulier au sein du management intermédiaire, pour déverrouiller des situations qui ne permettent pas aux femmes talentueuses d’émerger. Il faut éduquer et sensibiliser sur les codes et les stéréotypes discriminants.
Orange, par exemple, a mis en place une formation intitulée “Je recrute, mais j’intègre”, ouverte aux recruteurs et à l’ensemble des managers.
Lisez la version complète des Actes du Colloque InterElles 2012.